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Pendant que certains construisent des fusées

Pendant que certains construisent des fusées

Fusée

Chaque année en cette période, c’est la même rengaine : après l’insouciance du temps des fêtes et sa ribambelle de joyeuses dépenses, mon compte en banque fait triste mine. Et ce ne sont pas les nouvelles de Statistique Canada sur l’inflation qui vont m’aider à redresser la barre.

Dans son rapport de janvier, l’agence nationale de statistiques du Canada indiquait que l’inflation annuelle avait atteint un rythme de 4,8 % en décembre, son niveau le plus élevé depuis 1991. Une accélération causée notamment par la hausse des prix des produits alimentaires – 5,7 % depuis l’année dernière, la plus forte augmentation de la décennie – des transports et des logements.

En parallèle, les données tirées de l’Enquête sur la population active montrent que les salaires n’ont pas suivi, augmentant de seulement 2,6 % sur la même période. En d’autres termes : les prix ont augmenté plus vite que les salaires et le pouvoir d’achat des Canadien·nes a diminué.

Si cette nouvelle inquiète à juste titre nos économistes – et mon banquier – , elle est dévastatrice pour les plus vulnérables d’entre nous. Les ménages les moins bien nantis subissent en effet de plein fouet les hausses des prix dans l’alimentation, la part de leur budget allouée à cette dépense étant en toute logique plus importante.

Ils, et surtout elles – les femmes étant largement surreprésentées dans les catégories les plus pauvres de la population – , sont également plus susceptibles d’occuper des emplois précaires, à temps partiel, où le télétravail n’est pas permis, rendant impossible d’économiser sur les coûts de transport ou sur l’essence.

Ajoutons à cela les mesures sanitaires qui aggravent l’isolement et le désespoir, l’anxiété omniprésente face à un avenir morose, les coupes dans les services publics, le racisme et le sexisme inhérents de nos systèmes et nous obtenons un bien sombre tableau pour les prochaines années.

Pendant ce temps, dans le monde des ultra-riches

Mais ce n’est pas tant cela qui me met en rage.

Ce qui m’attriste et me désole profondément, c’est que pendant ce temps, pendant que les files s’allongent devant les banques alimentaires, que les organismes communautaires s’écroulent sous les demandes d’aide et que la majorité de la population peine à joindre les deux bouts, les 100 PDG les mieux payé·es du pays ont enregistré leur deuxième meilleure année de rémunération.

Selon un rapport du Centre canadien de politiques alternatives, ces cadres ont gagné en moyenne 10,9 millions de dollars en 2020, soit près de 200 fois plus que le salaire moyen des Canadien·nes. Parmi ces 100 PDG, 30 ont dirigé des entreprises qui ont reçu la Subvention salariale d’urgence du Canada, c’est à dire des fonds financés par l’ensemble des contribuables ayant pour but de venir en aide aux plus démuni·es.

À l’échelle mondiale, ainsi que l’a démontré Oxfam dans un autre rapport, les dix hommes les plus riches du monde ont plus que doublé leur fortune ces deux dernières années. Selon ce même rapport, une taxe unique de 99 % sur les richesses qu’ils ont accumulées durant la pandémie permettrait de produire suffisamment de vaccins pour le monde entier et de renforcer les programmes sociaux et sanitaires dans plus de 80 pays.

Mais bon, faire un tour en fusée dans l’espace avec ses chums, c’est quand même plus excitant, non?

Pour une fiscalité plus juste

Alors que les écarts se creusent chaque jour davantage entre riches et pauvres, aggravant les inégalités de genre, sociales et raciales partout dans le monde, il nous faut réagir. Il nous faut mettre en place des mécanismes de redistribution des richesses. Il nous faut une fiscalité plus juste.

Nous devons taxer ceux et celles qui ont les moyens de créer un monde meilleur, ceux et celles qui ont acquis leur fortune sur le dos des autres, des 99 %.

Il est temps d’instaurer un impôt sur les grandes fortunes, de prendre des mesures ambitieuses pour lutter contre l’évasion fiscale et de conditionner les aides gouvernementales aux entreprises à certains critères tels que le respect de l’environnement.

Et quand le prix des denrées alimentaires aura explosé, nous mangerons les riches, pardi!

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