Moins de roses, plus d’authenticité
Chocolats en forme de cœur, abondance de froufrous et de paillettes rouges, pendentifs estampillés «Je t’aime» par centaines dans les vitrines des magasins : difficile de passer outre le fait que la Saint-Valentin s’en vient à grandes enjambées, renforçant les stéréotypes liés à l’amour romantique.
Pour de nombreuses personnes, la Saint-Valentin est la fête de l’amour par excellence, l’occasion de se faire plaisir et de gâter sa moitié avec une sortie au restaurant ou une gentille attention.
D’autres, jugeant cette fête un peu ringarde, préfèreraient l’oublier, si ce n’était les regards lourds de sous-entendus de leur partenaire et les prodigieux efforts publicitaires déployés pour les culpabiliser de leur manque d’enthousiasme.
Enfin, d’autres encore considèrent cette fête avec beaucoup de méfiance, n’y voyant qu’une énième tentative opportuniste et mercantile de renforcer les stéréotypes de genre… Devinez à quelle catégorie j’appartiens?!
La fête des clichés sexistes
Une des principales critiques entourant la Saint-Valentin est qu’elle ne valorise qu’un seul type d’amour, l’amour romantique, dans le cadre d’un seul modèle, le couple hétérosexuel.
Cette focalisation sur l’amour romantique diminue l’importance des autres formes d’affection, comme l’amitié ou l’attachement familial, pourtant tout aussi importantes pour notre bienêtre et notre épanouissement.
D’autant plus que l’amour romantique, tel que généralement présenté dans la culture populaire, met souvent l’accent sur la possession et la dépendance, plutôt que sur l’égalité, avec d’un côté des hommes qui prennent les initiatives, et de l’autre des femmes plutôt passives. Cette vision conservatrice de l’amour renforce les stéréotypes de genre et entretient les déséquilibres de pouvoir au sein du couple.
Quant à la primauté du modèle hétérosexuel, il contribue, entre autres, à invisibiliser les personnes appartenant aux communautés LGBTQIA+, qui peuvent se sentir exclues ou marginalisées face au déferlement d’images de couples hétéronormés aux sourires parfaits et de femmes hypersexualisées se faisant belles pour leur amant.
Difficile de se sentir légitimes lorsque personne ne nous ressemble dans les catalogues des magasins, lorsque la société ne nous propose aucun modèle auquel nous identifier.
Et je ne parlerai même pas des couples polyamoureux ou des personnes célibataires, qui ne font simplement pas partie des discours publics en ces temps de massages aux pierres chaudes pour deux et de bouquets de roses directement importées de Colombie ou d’Équateur en avions-cargos réfrigérés — car lorsqu’on aime, on ne compte pas son bilan carbone, n’est-ce pas?
Pic de violence domestique
Ces dernières années, plusieurs organismes féministes ont également tiré la sonnette d’alarme quant au pic de violence domestique qui accompagne la Saint-Valentin. Une étude de l’Université de Calgary a montré que ce soir-là, le nombre d’appels à la police pour violence conjugale augmente fortement.
Rien de bien étonnant lorsqu’on se rappelle que, contrairement aux idées reçues, la grande majorité des agressions sexuelles ne sont pas commises par des inconnus dans des stationnements souterrains, mais bien plus souvent par un conjoint, un petit ami ou un homme avec qui la victime avait un rendez-vous galant.
Mais pourquoi un pic à la Saint-Valentin? Car ce jour-là, le sexe se doit souvent d’être au rendez-vous. Certains hommes, ayant dépensé de l’argent pour offrir fleurs, parfums et dessous affriolants à leur dulcinée, dans une logique capitaliste et patriarcale, se sentiront habilités à réclamer une relation sexuelle en échange de leurs présents, d’autant plus s’ils ont consommé de l’alcool ou des drogues. Si leur partenaire refuse, l’ambiance peut rapidement dégénérer jusqu’à l’agression.
Vers de nouveaux modèles
Heureusement, de plus en plus de voix s’élèvent pour réclamer de nouveaux modèles. Çà et là, nous assistons à l’émergence de mouvements visant à briser les stéréotypes de genre dans les relations amoureuses et à promouvoir des relations égalitaires basées sur le respect, la communication et la complicité.
Il ne s’agit pas de tourner le dos à Cupidon. Simplement de célébrer l’amour différemment, avec créativité, ouverture d’esprit et bienveillance.